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mercredi 14 juillet 2021

Grateful Dead – « Skull & Roses » (1971)

 

 

Qu’on se le dise, le combo US est encore et toujours « still alive and Well » tout autant que « back to the future ».

Jeudi 25 juin 2021, The Grateful Dead sort dans les bacs des disquaires, à l’occasion du 50ème anniversaire de son second album en public (au titre sobrement éponyme), une version remastérisée et enrichie de 11 titres live de la même époque.

Je l’ai acheté. Je le guettais depuis le Nouvel An. J'impatientais de tant de souvenirs à lui attachés ..!

Cet opus de 1971, à ne pas confondre avec le premier 33 tours studio du groupe paru sous le même titre, fut plus tard surnommé par les Deadheads (fans de toujours, les inconditionnels du groupe) : « Skull & Roses» (la pochette, d’un simple coup d’œil, explique tout) et/ou «Skullfuck », littéralement « enc**age de crane », titre initialement envisagé par le combo mais refusé par Warner Bros (on se demande pourquoi.. ?). Il fut, en outre, le premier disque d’or de la longue carrière d’un groupe pas tout à fait comme les autres.

Cet album je l’ai depuis 50 ans tout rond, en version originale 33 tours double vinyle, et, accessoirement, en réédition simple CD datant des 90’s qui n’eut d’autre intérêt qu’un banal et terne repiquage de l’original.

50 ans …

 … un demi-siècle ; c’est dire si les deux galettes noires ont tourné sans guère de répit sur ma platine disque. C’était l’époque où je n’en possédais à grand peine que quelques-unes. La zique à Jerry Garcia (g), Bob Weir (g), Bill Kreutzmann (d), Phil Lesh (b) et Ron "Pigpen" McKernan (h&organ) m’a "zonzonné" dans la tête des années durant ; je ne l’ai guère apprécié d’emblée (çà a changé depuis), lorgnant alors plutôt vers le hard naissant, bientôt foisonnant. Les airs du Dead, donc, faute de grives mangeant des merles, m’ont trotté sur les tympans, chatouillé les cages à miel. Ses chansons ont tressauté sur la peau des baffles et sous la pression des watts, craqué sous le saphir (rarement remplacé par un neuf plus affuté, moins soc de charrue et éplucheur de vinyle noir). La double pochette a morflé d’un copain à l’autre, s’est zébrée de déchirures où le ruban scotch s’est avéré pire que de laisser tel que. Je n’ai jamais pris spécialement soin de mes 33 tours, j’ai eu tort (çà a changé depuis). J’avais 16 ans (Bongu, que de temps écoulé) et avais acheté l’opus en Andorre en 1971 sur la route de l’Espagne. Là bas, les clopes (saloperies) et les 33 tours (la cire noire comme du miel d’ébène dans les trompes d’Eustache), c’était donné par rapport au prix du Prisunic.

 Grateful Dead m’avait été conseillé par Tonton Rock & Folk lui-même. C’était le mensuel rock et consorts des lycéens, LA référence d’alors, devant Best et Extra.  Des critiques érudites, diverses et variées (mais parfois un tantinet partiales et subjectives). On n’avait que cette prose professionnelle à se mettre sous la dent pour se faire une idée, décider de ses rares achats vinyle (d’autant qu’alors je commençais à collectionner aussi la SF et un tantinet la BD) ; c’était le temps du chiche argent de poche qui hésitait entre Philippe Druillet, Fiction et Led Zep.  Un peu de radio ondes longues compensait, volume en sourdine la nuit sous les draps, un chouia de télé itou, les deux pourtant à des heures impossibles ; la tête "farfottait" au lycée dès le premier cours du lendemain, mais bon, c’était çà ou rien. Les rares prêts médiathèque favorisaient, loi du nombre aidant, la variétoche en écho aux shows TV des Carpentier.

Le double album était, parait t’il, au ressenti de Rock & Folk, LE chef d’œuvre rock depuis les tamtams de la Préhistoire, une splendeur, une beauté, une cavalcade d’anges-notes sur la peau des tympans, un délice sonore ronronnant dans les cages à miel. J’y ai cru, j’ai cédé, j’ai acheté et dubitatif je suis resté trente ans durant (n’y avait t’il pas eu foutage de gueule journalistique, markéting menteur ?). Ce ne m’était pas l’Attendu au gros son gras souhaité, celui bien gorgé de décibels libérés, le disque élu par les dieux rock. C’était mou de la croche, doucereux, mielleux, lent et gentillet, guimauve et marshmallow, bourré d’un feeling qui n’avait rien de novateur mais semblait s’accrocher aux clichés d’une vieille musique US (country, bluegrass, blues …). De la musique pour sommeiller et bailler. Ce me fut déception ? Ô combien ..!  A une époque où je kiffais Led Zep, Deep Purple et Black Sabbath à fond les vue-mètres et peaux d’ampli tressautant sous la pression des watts, écouter le Dead m’avait semblé un tantinet mettre du sucre dans le bon Whisky qui arrache. Il m’a fallu du temps pour assimiler, comprendre, m’y faire, apprécier, me sentir en osmose avec SA musique.

Et puis, il y avait cette pochette double. Un squelette, des roses, un cercueil de cristal, des ornementations art déco dans les coins. On était alors grand format avec les 33 tours sous les yeux, en 16/9ème panoramique, loin du format riquiqui du CD actuel. L’illustration en cinémascope, recto et verso externes déployés en une seule et unique image, symbolisait ce que le Dead était déjà et reste encore : un pied de nez à l’éternité d’une carrière (ils sont toujours là sur scène à drainer une foule de babas-cools enfumés), un écho d'un genre musical qui renait de nos jours (le néo-psychédélisme), et d’un modèle social cru caduque. Cette double illustration, je la regarde maintenant avec mes yeux d’alors ; mon regard pétille de nostalgie (foutu gamin que je suis encore tant d’années plus tard) ; elle fait partie de ma longue histoire avec le rock et appartient à mon best of des meilleures pochettes. Elle est belle, culte, marquée d’une culture graphique typée qui n’appartient qu’au groupe ...  


1971. C’était la grande époque du combo, celle fertile et enthousiaste d’une idée musicale au sommet de son art, au summum de sa réactivité et de sa créativité, entre les lents mûrissements fébriles et expérimentaux des débuts (1965) et la routine tranquille de la suite. Le problème étant, d’une part, qu’en 1971 le mouvement hippie avait déjà un petit coup dans l’aile. Le drame d’Altamont était passé par là, 2 ans plus tôt, pour sonner le glas du "Summer Of Love" et plus globalement de la mouvance « Peace and Love » désormais sur le déclin. Les mecs du Dead étaient déjà (sans le savoir ?) dinosaures en devenir, survivalistes d’un modèle social avorté qui allait, néanmoins, perdurer à bas bruit obstiné sous leur égide. La tribu « Brothers and Sisters », greffée dans le sillage du combo, communautaire et marginale, allait peu à peu gommer ses couleurs éclatantes psychédéliques, perdre en nombre, gagner en grisaille ambiante mais se redonner du sang neuf et resplendir à nouveau lors de chaque concert, moins par nostalgie que par conviction profonde que l’idée hippie n’était pas qu’utopie. Les trips scéniques proposés par un Grateful Dead peu à peu devenu mythique, marathoniens (parfois 5 heures) et différents d’un soir au lendemain, garderaient, décennie après décennie, ses aficionados fidèles. Le combo, au nom désormais raccourci en The Dead, remplit toujours les stades ; nombres de leurs shows sont accessibles sur le Net … souvent dans une logique étonnante de gratuité.

 L’acid-rock de la Côte Ouest, laissant désormais les musiciens plus prudents d’eux-mêmes mais de moins en moins azimutés et fertiles, allait laisser place à des courants rock nouveaux plus centrées sur la rentabilité. Le Dead allait rester fidèle à lui-même.

The Grateful Dead est un groupe étonnant, de scène principalement, auto-astreint par défi à ne jamais jouer d’un soir sur l’autre un morceau donné de la même manière ; cette philosophie a ainsi teinté ses shows d’impros perpétuelles de longueurs variables et à peine décelables. Chaque concert est celui de l’instant, d’inspirations ponctuelles pour des paysages sonores sans cesse changeants et mouvants. On est loin des shows carrés et millimétrés de la concurrence. Le Dead ne se renouvelle pas, il s’arrange avec lui-même ; et çà marche, sa longue carrière en est la preuve. De plus, sa politique de quasi gratuité a largement contribué à sa popularité et à sa pérennité ; peu de groupes ont osé et réussi ce chemin-là : c’est à mon sens sa plus grande victoire.

Jerry Garcia, le poupin barbu, leader incontestable du combo, est classé parmi les guitar’s heroes du rock ; peut-être à tort considérant qu’il n’est en rien « m’as-tu-vu-? » et nombriliste ; son jeu est certes volubile mais en rien uniquement démonstratif de sa seule technique ; il y a de l’âme dans ce qu’il met en soli, de l’aérien, de la limpidité, de la pureté, du soleil et de la sérénité ; ses notes cristallines et limpides explorent les couleurs d’un arc-en-ciel psychédélique alors en vogue sur la Côte ouest des USA. On a l’impression douce, planante et plaisante qu’il n’en fait jamais des caisses, que laisser courir ses doigts sur le manche, en dehors de toute esbroufe technique est son éternel crédo. Tout y est naturel comme allant de soi. Son décès en 1995, bien entendu en un lent et fatal murissement implosif de substances hallucinogènes diverses, a laissé s’envoler et se volatiliser un jeu éthéré que personne, par la suite, n’a vraiment pu substituer au sien. Depuis lors, la magie d’un combo à nul autre pareil s’est un tantinet évanouie sous le brûlant soleil de la Côte Ouest.

Et de conclure comme j’ai commencé : The Grateful Dead - "Skull and Roses" is "still alive". Il fait partie de ces albums dont, lent au démarrage, j'ai mis du temps à accepter le génie: "Kobaia" le premier Magma, "Live at the Fillmore East" de l'Allman Brothers Band ou "Electric Ladyland de Jimi Hendrix*.

*Reste maintenant à me convaincre pour tous les Beatles à l'exception d'"Abbey Road"; et ce n'est pas gagné. 


Disc One: Original Album Remastered
01. “Bertha”
02. “Mama Tried”
03. “Big Railroad Blues”
04. “Playing In The Band”
05. “The Other One”
06. “Me & My Uncle”
07. “Big Boss Man”
08. “Me & Bobby McGee”
09. “Johnny B. Goode”
10. “Wharf Rat”
11. “Not Fade Away/Goin’ Down The Road Feeling Bad”

Disc Two: Fillmore West, San Francisco (7/2/71)
1. “Good Lovin’”
2. “Sing Me Back Home”
3. “Mama Tried”
4. “Cryptical Envelopment”
5. Drums
6. “The Other One”
7. “Big Boss Man”
8. “Not Fade Away”
9. “Goin’ Down The Road Feeling Bad”
10. “Not Fade Away”

Musicians:
    Jerry Garcia - guitar, vocals
    Bill Kreutzmann - drums
    Phil Lesh - bass, vocals
    Pigpen (Ron McKernan) - organ, harmonica, vocals
    Bob Weir - guitar, vocals

    Merl Saunders - organ on Bertha, Playing In The Band, Wharf Rat (overdubbed in studio)

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